
Algérie : Les effets dévastateurs des panaches de méthane de Hassi R’mel
Un énorme nuage de méthane (CH4), un gaz à effet de serre et de surcroit tueur climatique, a été repéré par un satellite dans le nord-ouest de l’Algérie près d’Oran, la deuxième ville du pays. Le panache de méthane observé se trouve près d’une ligne partant du gazoduc Medgaz qui alimente l’Espagne, rapporte l’agence Bloomberg.
Au total, trois panaches de gaz ont été observés par un satellite de l’Agence spatiale européenne (ESA) fin mai. Le plus puissant d’entre eux avait un taux d’émission de 118 tonnes de méthane par heure et était situé à environ 13 kilomètres d’une ligne de distribution qui est connectée au gazoduc Medgaz, selon l’analyse de sociétés, citée par Bloomberg (un rejet d’une heure a le même impact climatique à court terme que les émissions annuelles de plus de 2.000 voitures).
Les taux d’émission ont atteint jusqu’à 4,5 tonnes métriques de méthane par heure à partir de la station de compression à Hassi R’mel, un site qui crache de manière régulière et indéfiniment ses fumigations précise encore l’agence américaine.
L’Algérie, (8 % des importations de gaz de l’Europe) est le troisième fournisseur du Vieux continent après la Russie et la Norvège et est considérée comme un point chaud mondial du méthane. Dans le passé, des émissions ont été observées régulièrement près du champ gazier de Hassi R’mel dans l’est du pays. Les scientifiques ont récemment déterminé que les équipements connectés au champ dégageaient du méthane depuis près de 40 ans.
En 2021, la société de géoanalyse Kayrros SAS a estimé que le gisement de Hassi R’mel a rejeté environ 939.000 tonnes de méthane soit 2/3 de plus par rapport à l’exercice 2020. Mais les torches pétrolières, du site gazier de Hassi R’mel, émettent du méthane à effet de serre depuis au moins 1984 , nuisant ainsi à l’environnement régional et portant préjudice au climat mondial, selon une nouvelle étude basée sur des satellites et partagée exclusivement avec « Unearthed ».
Bref, ces puissants panaches de gaz à effet de serre détectés par satellite dans le nord-ouest de l’Algérie près d’Oran, sont à proximité d’un pipeline relié au gazoduc Medgaz qui fournit environ un quart du produit de gaz naturel consommé en Espagne, selon Bloomberg.
D’aucuns prédisent dans ces fuites sont un acte volontaire du régime algérien qui surenchérit à valeur d’une interruption de sa livraison en gaz vers l’Espagne au profit de l’Italie. L’Espagne, en connaissance de cause s’en tient actuellement et de plus en plus à la fiabilité de l’alternative du GNL américain depuis son coup de froid avec l’Algérie. C’est également l’apanage de l’Europe qui s’est fixée le plein respect des engagements climatiques pris lors de la COP26 à Glasgow et dont l’Allemagne, la France et l’Espagne sont les fers de lance en la matière si l’on peut dire.
Aussi, si pour l’heure on semble vouloir encore compter sur l’approvisionnement en gaz d’Algérie, c’est vers d’autres horizons gaziers plus propres que les regards des pays d’Europe se tournent désormais. « Le champ gazier géant de ce pays d’Afrique du Nord sur lequel l’Europe compte pour combler son déficit d’importations russes, risque de compliquer les objectifs climatiques de l’UE », a averti Bloomberg pour dénoncer la pollution de l’exploitation du gaz algérien. L’agence indiquant en outre que l’Algérie n’est pas signataire d’un engagement visant à réduire les émissions de 30% d’ici 2030, paraphé lors de la COP26 à Glasgow.
En tant que deuxième gaz à effet de serre, le méthane est très surveillé. Récemment, l’instrument de surveillance atmosphérique Tropomi a permis d’observer d’immenses fuites de méthane équivalant à 20 millions de véhicules circulant pendant un an.
Lancé en 2018, l’instrument de surveillance troposphérique Tropomi à bord de la mission satellite ESA Sentinel 5-P a permis d’évaluer les émissions avec une meilleure résolution spatiale. 1 800 panaches de méthane dans le monde ont été observés sur deux ans (2019-2020), dont une grande partie se situe au-dessus de la Russie, du Turkménistan, des Etats-Unis, du Moyen-Orient et de l’Algérie. Ces « fuites » (estimations minimales) ont un impact climatique équivalant à 20 millions de véhicules circulant pendant un an et correspondent à 10 % des émissions dans ce secteur.
Selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM), en 2020, les niveaux de gaz à effet de serre dans l’atmosphère ont atteint des records et la tendance se poursuivait en 2021. Continuant ainsi d’alimenter un réchauffement climatique à l’origine de plus en plus d’événements météorologiques extrêmes et d’autres graves conséquences pour la vie sur notre Terre (santé, productivité du travail, rendements des cultures…)..
Au petit compte, les impacts polluants du CH4, avantagent (4.400 USD par tonne de CH4) à environ 6 milliards de dollars le Turkménistan, 4 milliards de dollars la Russie, 1,6 milliard de dollars les Etats-Unis, 1,2 milliard de dollars l’Iran et à quelque 400 millions de dollars le Kazakhstan et l’Algérie. Joli pactole !
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