Ifrane : Lorsque la bureaucratie tue l’ambition des jeunes

 » Reviens dans une semaine »,  » reviens dans un mois« ,  » le responsable n’est pas là », « il faut que le comité se rassemble« …. Autant de réponses que reçoivent les citoyens lorsqu’ils se présentent dans une administration publique pour déposer une demande d’autorisation pour démarrer leur projet et qui poussent certains à abandonner leur projet et leur rêve. 

Alors qu’on croyait que les choses avaient changé, de même que les mentalités, l’administration marocaine vient nous rappeler souvent que rien n’a changé. Les différentes expériences vécues par les Marocains au sein des administrations sont là pour en témoigner.

À quelques exceptions près, de fonctionnaires qui veulent contribuer à changer les choses, mais se retrouvent les mains liées, d’autres se soucient guerre de l’importance et de la vitalité d’un document pour le citoyen. Complication est le mot qui règne au sein de l’administration. Et même lorsqu’on a voulu « réformer l’administration publique » et « digitaliser » les services, on s’est rendu compte que ce n’est qu’un rêve ambitieux et lointain qui profitera peut-être à nos petits enfants, si les mentalités changent un jour.

L’histoire d’un jeune marocain, qui a fait le tour de la toile ces derniers jours, est venue remettre sur la table la lourdeur et la persistance de la bureaucratie chronique dont souffre notre pays et les complications rencontrées au sein de l’administration.

Il s’agit d’Othmane Barakat, un jeune étudiant marocain qui a quitté l’Université Al Akhawayn d’Ifrane pour lancer son propre business dans la même ville, avant d’être confronté à la bureaucratie. Il a même tenté de se suicider en direct sur Facebook. Aujourd’hui, Othmane est saint et sauf et a même partagé son histoire sur les réseaux sociaux. La commune d’Ifrane a également livré sa version des faits.

Issu d’une famille modeste, Othmane Barakat a lancé sa propre start-up, un restaurant qu’il a ouvert à Ifrane. Ayant rencontré un grand succès, Othmane a décidé de lancer un deuxième restaurant dans la même ville. Pour stocker les produits alimentaires qu’il utilise dans ses deux restaurants, il a décidé de louer un dépôt à Azrou, faute de disponibilités à Ifrane, selon lui.

Et c’est là où le cauchemar de ce jeune marocain a commencé. Othmane Barakat raconte avoir déposé une demande auprès des autorités locales d’Azrou pour avoir les autorisations nécessaires et pouvoir ainsi stocker les produits alimentaires dans le dépôt qu’il a loué et les transporter par la suite d’Azrou à Ifrane (15 min de route).

Un mois après, Othmane n’a toujours pas reçu de réponse de la part des autorités locales malgré le reçu cacheté de sa demande, raconte-t-il. Il s’est donc rendu à nouveau à la commune d’Azrou pour demander des explications.

On lui a d’abord dit qu’avec « la digitalisation de l’administration« , la demande doit se faire via le site internet « Rokhas.ma« . Mécontent, Othmane leur a expliqué qu’il est engagé dans le loyer d’un magasin à 4.500 DH/mois et qu’il ne pouvait pas attendre un mois de plus. Il a tout de même fait la demande sur la plateforme digitale, mais sans aucune réponse.

Une semaine après, Othmane s’est à nouveau rendu à la commune où on lui a clairement expliqué que  » pour avoir les autorisations nécessaires, un comité composé des autorités locales, de toutes les autres parties concernées doit se rassembler pour faire une visite des lieux et lui délivrer les autorisations nécessaires « . Et pour que ce comité se réunisse, «  il faut au moins 6 ou 7 demandes similaires à la sienne pour qu’il se déplace d’un seul coup, vu que le comité ne peut pas se déplacer rien que pour une seule demande« , raconte Othmane.

À force de faire des aller-retour à la commune pour ses autorisations, Othmane raconte qu’on lui a dit verbalement, et sans aucun écrit, qu’il pouvait « démarrer son activité et que les autorités allaient lui rendre visite« . Et c’est ce qu’il fait.

Et c’est là où Othmane a fait l’erreur d’ouvrir et démarrer son activité de stockage et de transport d’aliments sans aucune autorisation dûment délivrée par les autorités compétentes, choses qu’il ne nie pas.

Son dépôt à Azrou a donc fait l’objet, quelques semaines plus tard, d’une descente des autorités locales, police, services de l’ONSSA, qui lui ont saisi tout ce qu’il y avait dans son dépôt pou « absence des autorisations nécessaires ». Il a également été arrêté par un barrage entre Azrou et Ifrane, en possession de denrées alimentaires et de viandes qu’il transportait sans autorisation.

Après une tentative de suicide en direct qui a échoué, Othmane a dénoncé sur les réseaux sociaux « l’abus » dont il a fait l’objet de la part des autorités locales d’Azrou. Ces dernières ont également livré leur version des faits.

Dans la soirée du jeudi 16 juin, la province d’Ifrane a démenti dans une mise au point, les accusations colportées par Othmane Barakat, dans une vidéo, contre les autorités locales suite à la fermeture d’un local qu’il exploitait.

Les autorités ont ainsi expliqué que la vidéo, partagée par Othmane, « comportant des déclarations truffées de contrevérités, à travers lesquelles un individu accuse les autorités locales de la province d’Ifrane de la fermeture d’un local qu’il exploitait, d’abus et de favoritisme, entre autres allégations et contrevérités sans fondements ».

« Étant donné que les faits liés à cette affaire font actuellement l’objet de procédures devant la justice, il importe de se limiter, actuellement, aux explications qui suivent, dans le but d’éclairer l’opinion publique à cet égard et de démentir les contrevérités véhiculées par l’individu dans ladite vidéo », a fait savoir la même source.

Quoi qu’il en soit, Othmane Barakat affirme qu’il a voulu faire les choses dans les règles de l’art en se rapprochant des autorités compétentes et en demandant les autorisations nécessaires. Mais la lenteur des procédures et les nombreuses complications au niveau de l’administration publique ont fait qu’il a perdu patience et même espoir. A bout de patience, il a commis l’erreur qu’il ne fallait pas, la suite on la connait!

Affaire à suivre….

Ifrane : Lorsque la bureaucratie tue l’ambition des jeunes Hespress Français.

Afficher plus

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page