
La Russie rappelle des forces de la frontière ukrainienne, Scholz en mission au Kremlin
La Russie a ordonné mardi le retour dans leurs garnisons d’unités déployées près de la frontière ukrainienne, laissant entrevoir une détente après des semaines de tensions avec les Occidentaux, qui attendaient toutefois des signes concrets d’un retrait.
Cette annonce est intervenue juste avant la rencontre à Moscou du chancelier Olaf Scholz avec Vladimir Poutine sur cette crise, nourrie depuis des semaines par le déploiement de plus de 100.000 hommes dans le voisinage immédiat de l’Ukraine, un pays pro-occidental que le Kremlin veut faire revenir dans sa sphère d’influence.
Leur réunion sera largement consacrée « à la sécurité et aux discussions qui sont en cours sur cette question, notamment en lien avec l’Ukraine », a relevé le président russe, tandis que le dirigeant allemand prédisait « de bonnes discussions l’un avec l’autre » sur ce thème.
Dans la matinée, le ministère russe de la Défense avait affirmé : les unités des districts militaires du Sud et de l’Ouest, des zones frontalières de l’Ukraine, « commenceront à retourner vers leurs garnisons » mardi.
« Nous avons toujours dit qu’après l’achèvement des exercices (…), les troupes retourneraient dans leurs garnisons d’origine. C’est ce qu’il se passe là, c’est le processus habituel », a commenté le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg a à cet égard exprimé un « optimisme prudent », tout en disant ne pas avoir vu de « signe de désescalade ». Pour le gouvernement français, il s’agit d’un « signal positif » si les annonces « sont confirmées ».
La cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock a jugé que l’annonce du retrait russe devait être « suivie de faits ».
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a quant à lui assuré mardi que les renseignements dont il disposait n’étaient « toujours pas encourageants », même si « la Russie se montre ouverte au dialogue ».
Moscou n’a donné aucune indication sur le calendrier et l’ampleur du retrait.
L’armée a diffusé des images de chars chargés sur des wagons de fret ferroviaire.
« Ni malin, ni sage »
Elle poursuit aussi ses manoeuvres au Bélarus, également voisin de l’Ukraine, jusqu’au 20 février.
Kiev a néanmoins salué l’union de l’Ukraine et de ses alliés occidentaux. « Nous avons réussi à empêcher toute nouvelle escalade de la part de la Russie », a déclaré le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba.
Dans les rues de la capitale, un optimisme prudent était là aussi de mise.
« Il n’y a pas de panique dans la société », a relevé Artem Zalouzny, un avocat de 22 ans sur Khrechtchatyk, l’avenue centrale de Kiev.
Mais « totalement croire (à une désescalade) ne serait ni malin, ni sage », a-t-il aussitôt tempéré.
Lundi, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait signifié une première éclaircie en recommandant à Vladimir Poutine d’approfondir le dialogue avec les Occidentaux.
Mais Washington, estimant une offensive probablement imminente, a abandonné son ambassade à Kiev pour l’installer à Lviv, plus à l’ouest.
Des dizaines de pays ont exhorté leurs ressortissants à partir d’Ukraine, en dépit des appels du président ukrainien Volodymyr Zelensky à garder son sang-froid.
Le porte-parole du Kremlin a pour sa part dénoncé une « hystérie qui ne repose sur rien ».
La Russie, qui a déjà annexé la Crimée en 2014 et soutient des séparatistes prorusses dans un conflit dans l’est de l’Ukraine depuis huit ans, a constamment nié toute intention belliqueuse.
Elle s’estime à l’inverse menacée par l’expansion de l’Otan et réclame des « garanties de sécurité », notamment l’assurance que l’Ukraine n’adhérera jamais à l’Alliance et que celle-ci retire ses infrastructures d’Europe de l’Est.
Journée d’unité
Ces exigences ont été rejetées par les Occidentaux, qui ont proposé en échange des pourparlers sur d’autres sujets comme le contrôle des armements, les visites réciproques d’installations sensibles ou des discussions sur les craintes russes en matière de sécurité.
Malgré le rejet de ces revendications, Sergueï Lavrov a recommandé à Vladimir Poutine de « prolonger et élargir » le dialogue.
Alors que des médias américains avaient évoqué la date de mercredi comme jour potentiel d’une invasion russe, le président ukrainien n’a cessé de son côté d’appeler au calme la communauté internationale et ses compatriotes.
Il a décrété le 16 février « journée de l’unité », appelant les Ukrainiens à manifester leur patriotisme en portant les couleurs bleue et jaune du drapeau ce jour-là.
Au risque d’irriter le Kremlin, Volodymyr Zelensky a aussi répété lundi que Kiev voulait rejoindre l’Otan afin de « garantir sa sécurité ».
Mais cette perspective n’est pas à l’ordre du jour, selon les Occidentaux qui, s’ils défendent l’ambition de l’Ukraine, n’ont jamais fixé de calendrier d’adhésion. Selon Sergueï Lavrov, de nombreux Européens « soupireraient de soulagement » si Kiev y renonçait.
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